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François GOMEZ (ex-Perpignan) : « La suite logique d’une aventure qui a mal tourné »

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François GOMEZ (Perpignan)_Harry JORDANLe technicien s’exprime sur la situation du club catalan © Harry JORDAN

Quelques semaines après son départ du club de Perpignan, François GOMEZ a accepté de répondre à nos questions pour faire un état des lieux de la situation du club qu’il a quitté après 3 saisons de bons et loyaux services. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le technicien nordiste ne mâche pas ses mots !

Beaucoup de monde a été surpris d’apprendre que tu quittais Perpignan. Que s’est-il passé ?

Je comprends la surprise des gens qui suivent les affaires de loin. Les plus avertis n’y verront que la suite logique d’une aventure qui a mal tourné.

Mon engagement pour le club a été total jusque là. J’ai traversé toutes les périodes difficiles qu’a rencontré le Perpignan Basket et je me suis battu sur et en dehors du terrain pour accompagner aussi loin que possible le projet pour lequel j’étais venu il y a trois ans. Je l’ai fait en acceptant ce que bon nombre de coaches n’aurait jamais accepté. Mais là, les limites du supportable ont largement été dépassées.

Depuis une saison et demie, les conditions de travail sont devenues compliquées mais j’ai tenu jusque là. D’autres salariés ont payé la mauvaise gestion du club avant moi. Les uns perdaient leur emploi, les autres leur santé et pour la plupart, leurs illusions et quelquefois leurs rêves. Mon tour est donc venu. Les résultats sportifs ont pu laisser supposer que les choses étaient rentrées dans l’ordre. Ce n’était qu’un écran de fumée qui cachait une situation déplorable. Les résultats étaient bien là car le groupe vivait en autarcie, loin des conflits entre dirigeants et nous acceptions la situation au nom du défi et de la performance. C’est d’ailleurs la seule chose positive que l’on peut retirer du contexte tragi-comique du club, la solidarité et la cohésion qu’il a aidé à créer dans le groupe.

Les problèmes nous ont vite rattrapés et les choses allaient s’empirer. Au bout du compte, les dirigeants ont oublié d’honorer les contrats de travail de plusieurs salariés. Les derniers salaires n’ont toujours pas été versés. Nous sommes plusieurs à avoir dû quitter nos logements car, ni les loyers ni les charges n’étaient payés et je vous passerai quelques détails qui nous ont valu, à moi et à d’autres les affres des avis à tiers détenteur, des visites de huissiers et autres procédures administratives et juridiques qui sont des plus inconfortables. La totale !!

Les dirigeants ne remplissaient plus leurs engagements mais surtout nous laissaient en plan, sans solution et sans soutien. On croit connaître les gens mais quelquefois la vie vous rattrape et on se rend compte qu’on s’est trompé. On subissait de pleine face les mensonges, les trahisons, le manque de respect de ceux pour qui vous vous étiez battu quelques mois plus tôt. La confiance était dès lors définitivement rompue.

Cette situation économique, sociale et humaine m’a convaincu de prendre la décision de rompre mon contrat qui était censé se poursuivre jusque mai 2016.

Je n’ai même pas eu à réfléchir au projet sportif et vous comprendrez bien pourquoi. De toute manière, les motivations des quelques dirigeants qui restent (en fait, ils ne sont plus que deux) ne s’articulaient plus du tout autour du sportif. Ils se battent, aujourd’hui pour sauver leur peau.

On pourrait résumer ma réponse à votre question par : plus de respect, plus de confiance, plus d’avenir.

Depuis trois ans, le nom du club était intimement lié au tien. On imagine que tu es parti avec tristesse et amertume. Globalement, quel est ton bilan de cette expérience catalane ?

Si mon nom a longtemps été associé à celui du club, c’est grâce à mon investissement sur et en dehors du terrain. On ne reviendra pas sur les résultats sportifs qui on été à la hauteur des ambitions affichées. Par contre, on peut évoquer mes actions auprès de l’ensemble des partenaires privés et institutionnels. J’ai véhiculé une image positive de notre sport et de mon club. J’en profite d’ailleurs pour les remercier à nouveau pour leur accueil et leur soutien. J’ai reçu quantité de messages de sympathie qui m’ont fait chaud au cœur. J’ai défendu le club et les salariés contre vents et marées lorsque nous étions au bord de la liquidation. J’avais des convictions, de la motivation et je croyais que c’était juste. Je me sentais bien à Perpignan et mes projets familiaux et personnels se catalanisaient. La part de l’affectif est devenue assez considérable. J’avais fait de ce club un projet sportif et humain. Malheureusement la passion m’a aveuglé et je n’ai pas vu que la base de l’édifice que je souhaitais construire était vérolée par l’incompétence et la malhonnêteté de ses dirigeants.

On peut dès lors comprendre que je sois parti déçu, triste et désabusé. Mais ces émotions ont laissé place à une volonté de faire valoir mes droits et de rétablir quelques vérités. Il faut aller de l’avant mais je dois régler définitivement les problèmes avant de passer à autre chose.

Le premier mot qui me vient à l’esprit et je l’ai souvent entendu dans la bouche de bon nombre de nos partenaires, c’est « quel gâchis ». Mon bilan ne peut dès lors être positif puisque j’étais venu avec l’idée d’accompagner un projet vers le haut niveau. Je vous rappelle qu’en l’état actuel des choses, le Perpignan Basket 66 est relégué au niveau régional et que je ne vois pas comment il pourrait en être autrement même si le système de propagande du président de la SASP tend à communiquer le contraire. Si la DTN et le Ministère des Sports font leur travail, l’existence du centre de formation sera vite remise en question*. Je ne doute pas que la Commission de Contrôle de Gestion ait fait le sien puisque la décision de relégation a été prise après avoir épluché les comptes du club. Je suppose que la situation précaire des salariés n’a pas été évoquée. Quand elle le sera, ca ne devrait pas plaider en faveur du Perpignan Basket et de ses dirigeants. Si le CNOSF explore plus en profondeur le dossier, il ne pourra pas encourager la FFBB à revoir la situation.

 Ce que je peux dire, c’est que toute expérience est bonne et qu’elle aide toujours à grandir. J’aurais souhaité que les choses se terminent autrement mais là, je n’y suis pour rien.

Comment as-tu vécu tous les rebondissements qui ont écorné l’image du club depuis que ton équipe a remporté le Final Four de Ligue 2 en mai ?

Je savais bien, avant le Final Four que les choses tourneraient vinaigre. Les observateurs présents à Calais ont bien vu que je n’ai pas sombré dans l’euphorie. J’ai juste exprimé le plaisir d’avoir fait mon travail et la satisfaction de gagner ce qui est tout à fait légitime quand on est un compétiteur. Je présageais ce qui allait se passer au cours des semaines qui suivraient ce titre. J’ai très vite évoqué mon départ avec les dirigeants qui n’ont pas souhaité envisager de solutions où chacun pourrait y trouver son compte. Si l’image du club était encore une fois écornée, celles des salariés ne l’était pas, bien au contraire. Notre travail a été récompensé par la victoire mais surtout par l’enthousiasme de nos supporters. Le reste ne nous concernait pas. Quand on parle d’image négative du Perpignan Basket, on ne parle jamais du sportif. On évoque instantanément les méthodes et les comportements d’une doublette d’individus et ce n’est qu’un juste retour des choses.

D’après toi qui sont les responsables de tout ça ?

 Quand la SASP s’est constituée, il y avait une équipe. Au fil des semaines, les actionnaires ont quitté le navire et le Président s’est retrouvé seul à la barre. Ses méthodes de travail ne convenaient à personne. Quand il s’est rendu compte qu’il allait tout droit dans le mur, il a rendu les clés du radeau au dirigeant emblématique et historique du basket perpignanais. Ne cherchez pas plus loin les responsables de cette situation même s’ils ont voulu faire porter le chapeau aux élus locaux et au président de la FFBB (cf. interview du président de la SASP dans « l’échos du Roussillon »). C’est facile de jouer les Caliméros et d’échapper à ses responsabilités. A un moment donné, il faut pouvoir se regarder dans la glace et accepter ses erreurs. Mais il semble que ce soit compliqué pour ces hommes-là.

Récemment, nous évoquions le fait que le Perpignan Basket 66 était sur le point de voir son centre de formation labellisé. Qu’est ce que ça t’inspire ?

Pour qu’un centre de formation soit labellisé, encore faut il qu’il existe. Le CNOSF a invité la DTN et le Ministère des Sports à évaluer cette structure fantôme. Rien d’autre. Ca n’a pas encore été fait. A partir de cette visite, une décision sera prise. Si vous avez vu le film « La Vérité Si Je Mens », il suffira d’ouvrir les portes de la boutique pour s’apercevoir qu’il y a de faux ordinateurs, des pseudos techniciens et des poules derrière chaque porte. La saison dernière, il n’y avait ni directeur, ni entraîneur diplômé, ni convention avec un établissement scolaire, ni convention avec un suivi médical et surtout, il n’y avait pas de joueuses. L’équipe réserve était constituée de fidèles éléments du club, trentenaires pour la plupart loin des standards de la formation. Les quelques jeunes qui restaient au club ont été intégrées à l’équipe professionnelle pour répondre à l’obligation de la règle des moins de 23 ans. A cause de leurs études, elles ne pouvaient s’entraîner que une à deux fois par semaine dans le meilleur des cas.

Tout ce qui avait été construit au cours des deux premières saisons n’existait plus depuis les affaires de l’été précédent. Là aussi, le sportif avait payé tous ses efforts devenus vains à cause de la gestion calamiteuse du club. Par ailleurs, comme d’autres salariés du Perpignan Basket 66, j’ai décidé d’entamer une procédure aux Prud’hommes. Je suis convoqué au bureau de jugement le 16 octobre 2014.

Il y a quelques mois, lorsque la rétrogradation de Lyon en championnat régional (annulée ensuite) a été prononcée par la FFBB, tu t’étais exprimé sur la page FB de notre site en faveur de la création de franchises comme en WNBA ou en Australie. Quelle est ta position à ce sujet ?

 Notre système ne récompense plus le résultat sportif mais privilégie la bonne santé économique des clubs. Le cahier des charges est imposant avec les règles financières, sportives et structurelles qui sont exigées. Gagner une accession sportive n’a plus grand sens si vous n’êtes pas en mesure de répondre à toutes ces exigences. Si pour évoluer au plus haut niveau, les conditions sont prioritairement liées au montant des budgets, aux diplômes de l’encadrement technique, à la structure de formation, d’entraînement et de compétition, la part du résultat sportif devient peau de chagrin. Il faudra bien admettre un jour qu’il faut passer à autre chose. On vit un peu dans le monde de l’hypocrisie en laissant croire aux gens qu’il suffit de gagner pour être récompensé. Il faudra expliquer aux dirigeants des clubs que la première chose à faire est de trouver une salle répondant au cahier des charges, de trouver des moyens financiers correspondant à l’évaluation d’un budget dont le montant serait clairement établi par les instances dirigeantes de notre sport, de mettre en place des équipes d’encadrement professionnel. On a grandi avec l’idée qu’il fallait construire une équipe pour être performant, l’entraîner dans les conditions que chacun pouvait se donner et aller tous les samedis batailler sur les parquets de France pour obtenir le Graal. Cette époque semble révolue. D’autres l’ont admis. La vérité, c’est que ce sont les mieux lotis qui aboutissent. Ne laissons plus rêver les « petits » qui pensent encore que c’est sur le terrain que se gagne le droit de rejoindre l’élite. Tout se passe dans les coulisses. Le rugby à treize en Europe en est l’exemple le plus flagrant. Cessons de croire au Père Noël. Il suffit de suivre l’actualité du sport français pour comprendre que les choses ont changé.

D’après toi, est-il pertinent de dire que le basket féminin français est actuellement en crise ?

La population française est gagnée par la sinistrose due à la période difficile que nous traversons. Le petit monde du basket n’y échappe pas. Nos aptitudes à la résilience ont fortement diminuées. On a perdu les valeurs du combat parce qu’on a vécu « le cul dans la graisse de canard » durant ces dernières décennies. Demandez à nos anciens si c’était plus facile avant. On peut toujours voir le verre à moitié vide. Sur le plan sportif, on n’a vraiment pas à se plaindre. Les résultats des équipes nationales sont bons. J’ai récemment mis un bémol en tentant d’expliquer que nous mettons des moyens que d’autres ne mettent pas. A chacun ses priorités. Nous possédons d’excellentes structures de formation, un encadrement dont on ne dit pas assez de bien. Il serait bon de communiquer un peu plus sur la qualité de nos entraîneurs et de nos coaches. D’autres ont su le faire à l’image des excellentes réputations des entraîneurs de l’ex-Yougoslavie ou de l’Espagne. Et puis quand on n’a pas de pétrole, il faut avoir des idées. La fédération et la DTN montrent la voie. Certains clubs sont des exemples à suivre. Que chacun balaye devant sa porte et mette en œuvre les processus qui font avancer le schmilblick. Les choses ne vont pas si mal que certains veulent le dire. Cependant, on peut toujours faire mieux.

*Hier, sur sa page Facebook, le club a indiqué que la procédure en vue de la labéllisation de son centre de formation était toujours en cours et qu’il a jusqu’à mercredi prochain pour fournir au CNOSF, qui ne donnera qu’un avis.

Un commentaire

  1. A Perpignan tout est bidon . Les dirigeants des tricheurs et des menteurs ! La honte du basket !

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